Qu’est-ce donc que ceci?

Nous avons vu précédemment que, lors d’une agression particulièrement violente, le cerveau de la victime disjoncte, pour la garder en vie, la coupant de toutes ses facultés émotionnelles, physiques et somatiques. Mais il n’y a pas que le circuit émotionnel qui est altéré, celui de la mémoire prend également un sacré coup, car en disjonctant, le cerveau empêche le lien entre l’amygdale et l’hippocampe (que nous pouvons, pour simplifier, considérer comme le système d’exploitation de la mémoire) qui a entre autres le rôle de transformer la mémoire émotionnelle en mémoire autobiographique, en évènement passé… Vous voyez où ça nous mène ? L’expérience traumatisante vécue par la victime reste « stockée » au présent !  C’est cela que l’on appelle mémoire traumatique.

 

Cette dernière va s’acharner à faire revivre encore et encore l’événement qui l’a mise en place, tant au niveau des « images » qu’aux niveaux, émotionnels et physiques. Les lieux, les mots, l’agresseur, la mise en scène, tout sera irrémédiablement là pour raviver le souvenir douloureux à la victime en la colonisant avec ce que l’agresseur a semé en elle : insultes, justifications, culpabilités, honte… les « tu vaux rien! » « t’es qu’une merde! » « tu mérites pas de vivre! »« tu l’as bien cherché! » etc. qui vont tourner en boucle dans l’esprit de la victime. Elle devient une véritable machine à remonter le temps incontrôlable entraînant ses voyageurs à traverser l’enfer sans discontinuer. C’est un véritable calvaire de Sisyphe !

On ne peut pas vivre avec une mémoire traumatique. Soit on continue de recevoir les violences et on ne la ressent pas du fait de la dissociation, soit elle surgit lorsque la victime se trouve dans un contexte où elle se sent en sécurité  (à l’école, par exemple où l’enfant va s’agiter, hurler, vociférer… mais ce n’est pas lui qui parle, c’est sa mémoire traumatique qui continue de rejouer les violences à l’abri des regards).

 

 

Comment en sortir ?

Pour sortir de ce cycle infernal, il faut travailler sur la transformation de la mémoire traumatique en mémoire autobiographique. C’est-à-dire que l’on doit prendre conscience d’avoir vécu des choses terribles sans pour autant les revivre à l’identique. Heureusement, il est possible de décoloniser la personne, de traiter cette mémoire pour qu’elle retrouve sa place dans le temps et l’espace et ainsi faire en sorte que le circuit refonctionne. Un travail psychothérapique par lequel on va revenir sur ce qu’il s’est passé, sur la sidération, pour que l’événement puisse être intégré et mène à une neurogenèse (création de neurones). Au final, on retrouve son indépendance, on a toujours vécu quelque chose (car on n’oublie pas, on replace et on intègre…), mais c’est désormais de l’ordre de la mémoire autobiographique. Quand on a une mémoire autobiographique, on est capable de parler d’un événement sans le revivre émotionnellement (on peut dire « j’étais terrorisée » sans être terrorisée).

 

Consciemment vôtre,

 

Marie Peyron
Fondatrice de Phoenix-Coaching